Désolé, pas de notation de un à six aujourd’hui. Je m’adresse à toi, cher lecteur, à la première personne comme pour prodiguer des conseils à un ami entre la première et la deuxième pinte du samedi soir : « eh, t’as vu le dernier film d’action estampillé Netflix ? Ça défouraille. » Non, partons plutôt sur autre chose… Le nouveau Marc Maron est disponible sur Netflix ! Une nouvelle apparition dans un film multi-récompensé ? Pas vraiment. Un rôle anecdotique dans la nouvelle production Netflix, aux côtés de Mark Wahlberg ? Non plus. La nouvelle saison de Glow et son rôle inoubliable de Sam Sylvia ? Malheureusement, non ! Mais 70 minutes (fois deux) aux côtés de Marc Maron restent possibles et c’est, en ces temps où la morosité est forcément palpable, comme un traitement nécessaire à nos maux de cinéphiles en manque de salles obscures. Maron s’offre une double parenthèse sous forme de rencontre entre lui et nous, et c’est GÉNIAL. Le guide, c’est par ici !
Marc Maron: End Times Fun, c’est un stand-up durant lequel Maron parle de lui, de sa carrière, de ses passions, de la culture au sens large du terme (ou quand l’ironie frôle à la perfection la lucidité) pour en fait nous parler de ce que sont devenus les États-Unis, aujourd’hui. Et le bonhomme ni va pas par quatre chemins. Il ridiculise nos tares – à tous – en deux trois mots dont le choix est au cordeau, appuie là où ça fait mal, pointe du doigt les aberrations de notre époque, détricote le système de son propre employeur (Netflix) avec une bonne humeur communicative, raille des groupes de musiques mythiques… tout en sachant que c’est l’amour qu’il leur porte qui le fait déclamer. Puis, plus que tout autre chose, il vomit l’ère trumpienne dont la réalité lui échappe littéralement. Il n’hésite pas à s’attaquer aux religions avec une savante d’ose d’autodérision (Maron est juif et c’est dans le dernier épisode de l’émission de généalogie des célébrités de PBS Finding Your Roots, que l’acteur découvre – aux cotés de Jeff Goldblum et Terry Gross – ses racines généalogiques). Il se joue des clichés qui envahissent le milieu de l’entertainment hollywoodien. Le bonhomme peut paraître acerbe, mais il a une telle façon bien à lui d’égrainer ses diatribes, le sourire subtilement contenu dans un pincement de lèvres, que la « Maron’s Touch » n’a qu’une appellation possible : l’humanité bienveillante.
Sous ses yeux, les services de VOD deviennent une abstraction, l’ubérisation de la culture est une triste réalité, et la « marvelisation » un phénomène inéluctable qui le relègue, de facto, au rang de ce qu’il nomme lui-même une star de « seconde zone ». Les gloires d’hier sont des papys qui ont à présent un pied dans la tombe, les groupes d’aujourd’hui ne se résument qu’à la plus simple expression d’un concept, et Dave Matthews Band serait l’un des pires : «Le seul endroit où les fans de Dave Matthew peuvent être à l’aise, c’est quand ils sont en sandales et short, qu’ils sautillent dans un stade !» Tout, dans les One-man-show de l’inoubliable Sam Sylvia, sonne aussi drôle que juste.
Acteur, compositeur, scénariste, producteur. Marc Maron est de ces créateurs touche-à-tout qui choisissent scrupuleusement leurs projets. En dehors de tous les faits d’armes précités, on peut également rappeler que Maron anime WTF With Marc Maron, 900 épisodes de podcast… l’un des plus importants aux États-Unis. Rolling Stone a d’ailleurs inscrit le podcast de Marc Maron numéro 1 sur sa liste des « 20 meilleurs podcasts comiques ».
Bref, foncez voir et surtout écouter Marc Maron. Deux spectacles sont disponibles sur Netflix : Marc Maron: Too Real et Marc Maron: End Times Fun (à regarder dans cet ordre, de préférence). C’est drôle, caustique, mieux écrit que – au bas mot – 95 % des spectacles de stand-up, touchant, humain, engagé. Bref, ce qui se fait de mieux dans le genre, et de très très loin !
Ci-dessous, les bandes-annonces (VO) des deux show. Que ceux qui ne sont pas bilingues se rassurent : les versions disponibles sur Netflix sont en VOST.